Fiche-info 102, publiée en novembre 2010 : les défenseurs de l’occupation israélienne et du blocus de Gaza se plaignent souvent du traitement « injuste » réservé à Israël par les organisations de défense des droits de la personne, y compris Canadiens pour la justice et la paix au Moyen‑Orient (CJPMO). Cette accusation est sans fondement. Cette fiche rappelle non seulement les principes fondamentaux défendus par CJPMO et sa position par rapport aux acteurs de la région, mais aussi la légitimité des critiques qu’elle et d’autres groupes de défense des droits de la personne ont formulées à l’encontre d’Israël.

Est-ce que CJPMO cible injustement Israël dans sa critique?

Série Fiche-info N.102, créée: Novembre 2010, Canadiens pour la Justice et la Paix au Moyen-Orient
 

phosphorus.pngLes apologistes de l’occupation israélienne des territoires palestiniens et de son blocus de Gaza prétendent souvent qu’Israël est la cible des critiques injustes des organisations des droits de l’homme – y compris Canadiens pour la justice et la paix au Moyen-Orient (CJPMO). Ceci est faux. Ils prétendent également que ces organismes ne tiennent pas compte ou appuient implicitement les violations des droits de l’homme commises par les Palestiniens ou d’autres groupes ou pays. Ceci est également faux.

 

Quels sont les principes de base et les convictions qui guident les positions et les actions de CJPMO?

Les positions et le travail quotidien de CJPMO sont guidés par trois piliers de base : le respect du droit international, des attentes égales envers toutes les parties au conflit et la conviction que la violence n’est pas une solution.

 

CJPMO tient-elle compte des violations des droits de l’homme commises par des acteurs non israéliens?

Oui. CJPMO critique constamment les violations commises par l’ensemble des acteurs au Moyen-Orient. Les points suivants sont des exemples de positions prises par CJPMO sur des actions d’acteurs autres qu’Israël :

  • CJPMO critique les attaques à la roquette contre Israël de la part de groupes militants à Gaza.[1]
  • CJPMO condamne les attentats suicide commis par les Palestiniens, affirmant par exemple :

« CJPMO croit de plus que tout acte de violence contre des populations civiles, qu’il s’agisse d’attentats suicides ou de bombardement massifs de zones ou d’infrastructures civiles, constitue une violation grave du droit international. De tels actes devraient être condamnés comme des moyens criminels et inefficaces d’atteindre des buts politiques. Indépendamment des différences en termes de capacité militaire, les populations civiles ne devraient jamais être réduites à des moyens d’atteindre des buts politiques; le fait de cibler des civils à la fois pour les agents étatiques et non-étatiques ne fait qu’exacerber l’intransigeance et qu’intensifier la polarisation qui affecte déjà la région. » [2] (Italiques ajoutées)

  • CJPMO a appelé à la tenue d’enquête à propos des Palestiniens et des Israéliens à la suite des rapports des organismes des droits de l’homme sur l’opération israélienne « Plomb durci » au début de 2009[3].
  • CJPMO a condamné la saisie temporaire d’une cargaison de riz et de farine par le Hamas en février 2009[4].
  • CJPMO exhorte le Canada à exercer des pressions sur l’Iran et la Syrie pour qu’ils arrêtent de fournir des armes au Hezbollah[5].
  • CJPMO appelle à la fin des interférences étrangères au Liban, y compris celles de l’Iran et de la Syrie[6].
  • CJPMO appelle constamment à un cessez-le-feu lorsqu’un conflit armé est déclenché entre Israël et ses adversaires militants[7].
  • CJPMO critique les violations des droits de l’homme commises par le Fatah – le groupe palestinien dirigeant l’Autorité palestinienne – et celles commises par le Hamas – le groupe palestinien administrant Gaza – à l’encontre de leurs partisans respectifs[8].
  • CJPMO a commenté la corruption au sein de l’Autorité palestinienne sous la direction du Fatah[9].
  • CJPMO a commenté les positions extrémistes prises par Al-Qaeda et certains partis d’opposition dans plusieurs pays arabophones[10].
  • CJPMO a informé le public sur le manque de démocratie en Égypte et sa loi sur l’état d’urgence répressive[11].

 

Pourquoi CJPMO se concentre-t-elle sur Israël et les Palestiniens?

Plusieurs raisons font de la situation entre Israël et les Palestiniens un élément central du travail de CJPMO:

  • Le conflit israélo-palestinien affecte grandement la stabilité de toute la région. La résolution du conflit israélo-palestinien est au cœur de la résolution d’autres tensions dans la région. Le Liban et la Jordanie, par exemple, acquerraient une plus grande stabilité une fois le problème des réfugiés palestiniens réglé.
  • Israël commet constamment des violations des droits de l’homme de par son occupation des territoires palestiniens. Par la continuation de l’occupation et du contrôle israélien des territoires palestiniens, Israël fait augmenter les tensions dans la région. Les Palestiniens en Israël subissent également une grande discrimination et de fréquents abus de la part des autorités israéliennes, ce qui fait aussi croître les tensions.
  • La société et l’économie palestiniennes sont dévastées par l’occupation israélienne. Les Palestiniens sont pour le moment l’un des peuples les plus pauvres de la région et le contrôle israélien des territoires palestiniens occupés (TPO) a créé et aggravé cette pauvreté. Compte tenu qu’Israël continue à restreindre sévèrement les activités socio-économiques des Palestiniens, ceci constitue également une source de tensions dans la région.

 

Pourquoi CJPMO et d’autres organisations de droits sont-elles si critiques envers Israël ?

Bien que toutes les violations du droit international doivent être condamnées, l’ampleur et la gravité des violations commises par Israël à l’encontre des droits des Palestiniens dépassent largement celles commises par les groupes militants à l’encontre d’Israël et ses citoyens. C’est pourquoi il est logique que CJPMO et d’autres groupes des droits de l’homme accordent une attention particulière à de telles violations. Par exemple, le nombre total d’Israéliens ayant trouvé la mort dans les huit dernières années en raison d’attaques à la roquette en provenance de Gaza ne dépasse pas 30. Pourtant, le gouvernement israélien prétend que les attaques à la roquette l’ont contraint à lancer un assaut de 22 jours le 27 décembre 2008 ayant causé la mort de 1400 personnes – la plupart des civils, y compris 300 enfants. De plus, l’occupation israélienne des territoires palestiniens depuis 1967 est l’une des plus longues de l’histoire contemporaine et, en tant que telle, mérite une attention particulière.

Ensuite, malgré son bilan déplorable en matière de droits de l’homme et de droit humanitaire, Israël aspire à une place parmi les démocraties libérales occidentales. Il a cherché à obtenir du soutien et un statut préférentiel auprès de l’Europe, du Canada et des États-Unis prétendant être une île de démocratie libérale dans une mer de despotisme. Il est donc tout à fait raisonnable de demander à Israël d’être à la hauteur des normes internationales en termes de droits humains, dans l’espoir de convaincre éventuellement Israël d’améliorer ses pratiques en matière de droits de l’homme vis-à-vis des Palestiniens.

 

CJPMO questionne-t-elle le droit d’Israël d’exister ?

Non. CJPMO croit qu’Israël est une présence établie au Moyen-Orient et ne devrait pas craindre pour sa survie. CJPMO comprend que la « solution des deux États » – c’est-à-dire un État palestinien coexistant avec un État israélien dans la paix et la sécurité – constitue la solution la plus largement acceptable au présent conflit. Cette approche reconnait implicitement le concept et la position éthique à l’effet qu’Israël doit continuer d’exister même si sa création s’est traduite par la dépossession d’un autre peuple, les Palestiniens. Toutefois, parce que CJPMO croit que la dépossession des Palestiniens par Israël – tant en Israël que dans les territoires palestiniens occupés (TPO) – est toujours en cours et s’intensifie, elle croit qu’il est de plus en plus critique qu’Israël cesse ses violations des droits de l’homme. Une telle position, néanmoins, ne pourrait jamais être assimilée à une suggestion de démanteler Israël ou de toute autre menace à son existence.



[1] Voir la prise de position de CJPMO “Humanitarian & Political Crisis in Gaza”, 12 january 2008; voir également la fiche-info de CJPMO « Attaques de roquettes Qassam à partir de la bande de Gaza »,janvier 2009.

[2] Voir la prise de position de CJPMO «Relever le défi : Une proposition de CJPMO pour la politique canadienne au Moyen-Orient», août 2009, pages 27 et 28.

[3] Voir la prise de position de CJPMO «Répondre aux récents rapports des droits de l’homme sur Gaza», décembre 2009.

[4] Voir le communiqué de presse de CJPMO “Canadian position on humanitarian relief to Gaza an enigma”, 16 février 2007.

[5] Voir la prise de position de CJPMO «Violences israéliennes au Liban», juillet 2006.

[6] Voir la prise de position de CJPMO, «Pour une politique canadienne positive et permanente au Moyen-Orient», juin 2007.

[7] Voir le communiqué de presse de CJPMO « Les civils se font tuer à Gaza », 5 janvier 2009; voir également la prise de position de CJPMO, «Violences israéliennes au Liban», juillet 2006 et «La guerre d’Israël sur Gaza»,janvier 2009.

[8] Voir le communiqué de presse de CJPMO “CJPME echoes concerns raised in Human Rights Watch Report concerning Palestinian Factions,” 31 juillet 2008.

[9] Voir la fiche-info de CJPMO «Le Hamas et les élections palestiniennes 2006», février 2006.

[10] Voir la prise de position de CJPMO «Relever le défi: Une proposition de CJPMO pour la politique canadienne au Moyen-Orient», août 2009, pages 10 et 11.

[11] Voir la fiche-info de CJPMO : «L’Égypte de l’après Moubarak», juillet 2010.

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