Fiche-info 3, publiée en mars 2009 : Ce document traite du Mur d’apartheid israélien, des objectifs visés par son édification, de son tracé et des impacts qu’il a eu sur les palestiniens. La fiche se questionne également sur la légalité d’un tel édifice. 

Le Mur d’apartheid israélien

Série Fiche-info N.3, créée: Mars 2009, Canadiens pour la Justice et la Paix au Moyen-Orient
 

3.jpgQu'est-ce « Le Mur »?

Le Mur est composé de deux types de structures : 1) Pour les régions urbaines, un mur de béton de huit mètres de haut, comprenant des tours avec des « tireurs d’élite » et des « zones tampon » de 30 à 100 mètres de largeur pour les clôtures électriques, les tranchées, les caméras, les détecteurs et les patrouilles militaires; et 2) Pour les régions rurales, des barbelés à lames et des clôtures, comprenant des couches de barbelés à lames sur les deux côtés d'une clôture électrique de trois mètres, des chemins pour les patrouilles militaires, des sentiers de sable destinés au retraçage des pas, des fossés et des caméras de surveillance.

La construction du Mur qui a commencé en juin 2002 et elle n’est pas encore terminée. Peu importe qu'on le considère comme un « mur », une « barrière » ou une « clôture », les impacts majeurs, soient la confiscation de terre palestinienne, l'appauvrissement forcé des communautés palestiniennes et la contrainte exercée sur les Palestiniens afin qu’ils abandonnent leurs maisons et leur propriété, restent les mêmes.

 

Quel est le tracé du « Mur »?

En 1948, la Résolution 181 des Nations Unies, qui établissait un État israélien et un État palestinien, avait alloué une proportion de 43 % de la Palestine historique à l'État palestinien. En 1949, lorsque les combats entre Israël et ses voisins arabes ont cessé, les accords d'armistice de la Ligne Verte ont permis de conserver seulement 22 % de la Palestine historique du côté est (palestinien) de la ligne. Malgré tout, le Mur lui-même n’est pas construit sur la Ligne Verte, mais dans une large mesure sur les terres palestiniennes, annexant de facto 11,9 % de la Cisjordanie[1].

La longueur projetée du Mur est de 723 km, soit plus du double de la longueur de la Ligne Verte et il sera construit à 86 % à l’intérieur de la Cisjordanie2 . Étant donné que le Mur a pour objectif de séparer la Cisjordanie et Israël, on peut se demander comment sa longueur peut atteindre près du double de celle de la Ligne Verte. Cela est attribuable au fait que le Mur se faufile  de façon répétée à l'intérieur de la Cisjordanie pour inclure les colonies israéliennes (les « colonies de peuplement »), les ressources en eau et les terres agricoles du coté israélien du Mur.

Puisque le Mur pénètre si fréquemment et si profondément en Cisjordanie, un grand nombre de Palestiniens seront coincés entre le Mur et la Ligne Verte ou encerclés per ce dernier. Dix-sept communautés, soit environ 27 520 personnes sont prises au piège entre le Mur et la Ligne Verte (zone fermée) et ont besoin d’un permis pour vivre dans leur propre maison.. Cinquante-quatre communautés sont entièrement ou partiellement encerclées par le Mur, soit 247 800 personnes3. Comme le mentionne le centre d’information sur les droits de la personne israélien, B’Tseelem, « En dessinant le tracé, les dirigeants israéliens ont presque totalement ignoré la violation importante des droits humains des Palestiniens. Le tracé est fondé sur des considérations externes qui n’ont rien à voir avec le sécurité des citoyens israéliens. L’un des objectifs principaux visés par le tracé est l’annexion de facto de la terre : lorsque le Mur sera terminé, approximativement 9 % de la Cisjordanie, comportant 60 colonies de peuplement, se trouvera du côté ouest, soit du côté israélien du Mur.» 4

 

Le but du Mur n’est-il pas de protéger Israël contre des attaques terroristes?

Si Israël était réellement intéressé à assurer sa sécurité, 1) il construirait le Mur du côté israélien de la frontière entre les deux États, 2) il se conformerait au droit international et se retirerait complètement des territoires palestiniens qu’il a occupé en 1948 et en 1967. Comment le Mur peut-il assurer la sécurité d’Israël si 27 520 Palestiniens sont en fait cloisonnés du côté israélien du Mur (voir ci haut)?

Il est plus facile de concevoir le Mur en tant que mécanisme de consolidation de l’occupation, des colonies illégales et de la colonisation continue de la terre palestinienne. Le Mur est encore mieux compris comme une annexion de territoire.

 

Quel est l’impact du Mur sur les Palestiniens en Cisjordanie?

Le Mur et le régime israélien des points de contrôle et des barrages routiers restreignent de façon significative le mouvement des personnes et des biens. Les gens ont difficilement accès aux établissements hospitaliers importants, aux institutions éducatives et à la propriété, ce qui se traduit par une détérioration critique du niveau de vie. Comme le mentionne le Bureau de la coordination des affaires humanitaires de l’ONU, « La barrière empêche l’accès aux services d’éducation et de santé clés; de plus, en isolant les puits des terres et en détruisant les réseaux d’aqueducs de même que les citernes qui se trouvent sur leur passage, on crée de nouveaux besoins en eau et en mesures sanitaires » 5. La construction du Mur a également mené à la destruction des terres agricoles et au déracinement de dizaines de centaines d’oliviers et d’agrumes palestiniens. Les personnes qui habitent dans les communautés de la zone fermée ont affirmé qu’elles étaient victimes de harcèlement et de violence aux points de passage. De nombreux ménages ont déménagé et les familles doivent vivre séparées. Les parents ne peuvent pas obtenir les permis appropriés pour visiter les communautés des zones fermées et les habitants de ces communautés ont un accès restreint aux terres agricoles6. Dans l’intervalle, on a poursuivi l’expansion des colonies et les routes « réservées aux Israéliens » qui assurent la libre circulation des colons ont isolé encore davantage la Cisjordanie et restreint les déplacements des Palestiniens.

 

3b.jpgQuel est le statut légal du Mur?

La Cour Suprême israélienne : La Cour Suprême israélienne a demandé au gouvernement israélien de modifier le tracé du Mur. En 2004, la Cour a déterminé que la trajectoire prévue aurait un impact négatif sur la vie des Palestiniens d’une manière qui est hors de proportion avec les exigences de sécurité d’Israël. La décision  se lit comme suit : « Le tracé que le commandement militaire a établi pour la clôture de sécurité [...] fait un tort important  aux habitants locaux tout en violant leurs droits an vertu du droit humanitaire et du droit international » 7.

La Cour internationale de Justice : La CIJ a déterminé en 2004 que le Mur construit par Israël était illégal parce que la majeure partie de ce dernier était aménagée sur les territoires occupés. Elle a affirmé que le Mur violait les droits des Palestiniens  et qu’ils devraient recevoir une compensation pour les dommages causés. Quatorze des quinze juges ont convenu que le Mur était illégal et que les Nations Unies devraient adopter des mesures afin de suspendre les travaux de construction. La décision se lit comme suit : «  La Cour estime que la construction du Mur et le régime qui y est associé créent un ‘fait accompli‘ sur le terrain qui pourrait  bien devenir permanent, auquel cas – et nonobstant la caractérisation formelle par Israël -  équivaudrait à une annexion de facto » 8. Le cas  a été déféré devant la CIJ par l’Assemblée générale des Nations Unies. La CIJ n’a pas un pouvoir contraignant si bien que la décision équivaut à un avis consultatif seulement. Tel Aviv a déclaré promptement qu’elle ignorerait la décision.

Le 30 avril 2006, Israël a approuvé un nouveau tracé pour le Mur. En dépit de la décision de la Cour Suprême israélienne, Israël n’a pas modifié la trajectoire dans l’une ou l’autre des sections construites et par la suite invalidées par la Haute Cour de Justice israélienne. La Cour a invalidé trois sections du Mur parce que le tort causé aux Palestiniens était hors de proportion avec les exigences de sécurité d’Israël et a ordonné qu’il soit déplacé.9

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[1] « Separation Barrier statistics. » B’Tselem. http://www.btselem.org/english/Separation_Barrier/Statistics.asp

2 Frykberg, Mel. « Trapped behind the Wall and the Green Line.» IPS. 26 fév. 2009. http://ipsnews.net/news.asp?idnews=45896

3 « Separation Barrier statistics.» B’Tselem. http://www.btselem.org/english/Separation_Barrier/Statistics.asp

4 « Separation Barrier. » B’Tselem. http://www.btselem.org/english/Separation_Barrier/Index.asp

5 « West Bank Barrier.» OCHA OPT UN. http://www.ochaopt.org/?module=displaystory&section_id=130&story_id=1456&format=html&edition_id=

6« OCHA Special Focus: The Barrier Fate and Permit Regime four years on. » OCHA OPT UN. novembre 2007. http://www.ochaopt.org/documents/OCHA_SpecialFocus_BarrierGates_2007_11.pdf

7 « Court orders changes to West Bank Wall. » The Guardian. 30 juin 2004. http://www.guardian.co.uk/world/2004/jun/30/israel1

8 Taylor, Mathew. « International Court rules against Israel’s Wall. » The Guardian. 9 juillet 2004. http://www.guardian.co.uk/world/2004/jul/09/israelandthepalestinians.unitednations

9« Communiqué de presse : Israel has not dismantled any section of the Separation Barrier that was nullified by the High Court. » B’Tselem. 9 juillet 2008. http://www.btselem.org/English/Press_Releases/20080709.asp

 

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